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Bled Number One

Kamel, expulsĂ© de France, revient dans son village d’origine. Il retrouve, non sans dĂ©sanchantement, une sociĂ©tĂ© masculine oĂą les femmes prennent leur repas Ă  part des hommes. Louisa qui s’en retourne chez ses parents parce qu’elle est malmenĂ©e par son mari, est confrontĂ©e Ă  la rĂ©probation de sa propre famille. L’atmosphère est Ă©touffante pour Kamel qui essaye malgrĂ© tout de s’accommoder de cet environnement.

RĂ©alisation. Rabah Ameur-ZaĂŻmeche
Scénario. Rabah Ameur-Zaïmeche, Louis Thermes
Image. Lionel Sautier, Hakim Si Ahed, Olivier Smittarello
Montage. Nicolas Bancilhon
Son. Timothée Alazraki, Bruno Auzet, Mohamad Naman
Production. Sarrazink Productions
Distribution. Les films du Losange
Format. couleurs
Durée. 1h42
Interprétation
Rabah Ameur-ZaĂŻmeche / Kamel
Meriem Serbah / Louisa
Abel Jafri / Bouzid
Ramzy Bedia /
Farida Ouchani /

Autour du film

Dans Wesh Wesh, Qu’est ce qu’il se passe, son premier long métrage, Rabah Ameur Zaïmèche, mettait en scène et interprétait le personnage de Kamel. Après avoir passé 5 ans en prison puis deux années d’exclusion en Algérie (double peine), Kamel était de retour dans la cité des Bosquets.

Ce précédent film s’achevait dans un panoramique vertical sur le ciel blanc pendant qu’en bande son, un morceau du groupe toulousain Tactikollectif (« Nekwi s warrach n leezzayer ») lançait le générique.

Bled number One s’ouvre sur un fondu au blanc, avec exactement la même chanson en BO… Ces signes indéniables de continuité entre les deux films ne résolvent cependant pas clairement la question de la chronologie des deux histoires. laquelle est la première. Wesh Wesh, Qu’est ce qu’il se passe pourrait servir de prologue à Bled number one comme il pourrait en être la suite (Bled number one raconterais alors les deux années d’exil forcé du personnage). Ce flou révèle bien ce qui sous-tend le travail de Rabah Ameur Zaimèche. difficile de définir un début lorsqu’on ne sait plus vraiment où tout à commencé. Si le titre du film affirme l’attachement du réalisateur à l’Algérie, et à son Bled en particulier, Kamel n’a plus vraiment de racines. Immigré sur le sol français, il est « Kamel-la-France » en Algérie.

Entre deux pays, entre fiction et réalité

Le générique de fin l’indique très clairement. Bled number one est un film fait en famille. Pour le tourner, Rabah Ameur-Zaimèche retourne en Algérie dans le village de sa famille où, enfant, il passait tous ses étés. En incarnant lui-même le personnage de son film, Rabah Ameur-Zaimèche brouille les frontières entre réalité et fiction.

Le tournage s’est déroulé en décors naturels et comporte, de fait, une part d’imprévus, renforcés par le choix de travailler avec des acteurs non professionnels en grande majorité. Dans la séquence de l’hôpital psychiatrique, à 1’18’39 qui est l’une des plus touchantes du film, les malades sont de véritables pensionnaires.

Dans Les Cahiers du Cinéma de mai 2006, le réalisateur explique qu’il a eu besoin d’un certain temps pour apprivoiser les habitants avant de tourner « En arrivant, j’ai voulu faire quelque chose de très classique, mais tout le village était là à nous entourer, c’était impossible de tourner. Par respect pour les habitants, on a tout arrêté et on a suivi notre instinct. Les premiers jours on a filmé les gens, les terrasses, les cafés, les cigognes, des animaux. Et puis une fois qu’on a été immergés, on a pu travailler ».

Le point de vue adoptĂ©, celui de Kamel, un personnage qui dĂ©barque et redĂ©couvre un pays qu’il n’a pas vu depuis longtemps, fournit un prĂ©texte narratif Ă  l’insertion de nombreuses scènes documentaires. Prenons l’exemple de l’accueil de Louisa par les pensionnaires de l’hĂ´pital. la camĂ©ra mobile, portĂ©e Ă  l’épaule (c’est-Ă -dire avec un axe de prise de vue Ă  hauteur du visage), l’adresse des femmes Ă  quelqu’un situĂ© hors champ. tout rappelle le dispositif du reportage tĂ©lĂ©. Cette sĂ©quence rayonnante de spontanĂ©itĂ© est probablement une des plus fortes du film.

Le réalisateur injecte une part de fiction en provoquant ces séquences. C’est peut être lui qui a demandé d’organiser la Zerda. Pourtant, ces moments n’en sont pas moins criants de vérité car ceux qui y figurent rejouent des gestes qui sont les leurs. La danse des hommes le soir de la Zerda par exemple pourrait aisément s’insérer dans un film documentaire sur la vie en Algérie, tant les gestes sont justes.

La mort du taureau pendant la Zerda a évidemment été réalisée sans effets spéciaux. le spectateur sent bien qu’elle a vraiment eu lieu. Le plan, unique et frontal au moment où la gorge est tranchée, l’atteste. En effet, sa mort aurait pu être suggérée par le montage de plusieurs plans.

Pour ne rien perdre du réel en train de se dérouler sous leur caméra, les opérateurs sont contraints de laisser tourner la caméra sans couper. Aussi, les plans-séquences sont nombreux et révèlent une équipe de tournage à l’affût de la relation humaine la plus juste.

Enfin le support du film véhicule immédiatement une sensation de réel. Les caméras utilisées pour ce film sont des caméras vidéo professionnelles généralement utilisées par les journalistes télé. La qualité de l’image fonctionne donc comme un code et impose au regard l’idée d’un film télévisé ou d’un documentaire

Une mise à distance réflexive

Si Wesh Wesh, Qu’est ce qu’il se passe était le film d’un réalisateur lucide et amer, il comprenait tout de même des chapes d’humour attendri envers ses personnages (la partie de golf avec des clubs volés, les paroles désagréables de la mère faussement traduites par sa fille à la petite amie de son fils) que Bled number one a liquidées.

Dans Bled number one. le réalisateur se débarrasse des conventions de la narration classique. plus vraiment d’intrigue (alors que Wesh Wesh, Qu’est ce qu’il se passe les tricotait en montage parallèle), mais un portrait, celui d’un pays, brossé au grès de l’errance d’un homme et d’une femme.

Les choix de réalisation de Rabah Ameur-Zaimèche sont peu communs. Nombreux plans larges, points d’écoutes orientés sur le paysage sonore plutôt que sur les dialogues des personnages (cf. onglet Analyse), longues focales, plans d’objets, de paysages… Comme le personnage, le spectateur n’est jamais vraiment avec les gens. Kamel se poste en observateur critique et la mise en scène va traduire cette attitude. Par exemple, la caméra souvent placée à distance des personnages les saisis fréquemment en zoomant ou en utilisant de longues focales. Ce type d’objectif (utilisé par les paparazzis) permet justement de se rapprocher visuellement de la personne filmée sans changer physiquement de place.

Le réalisateur donne à ce film une dimension plus poétique que dans son précédent. Il insère des plans contemplatifs (paysages algériens, scènes de rues) qu’il fait durer mais aussi des périodes musicales intégrées à l’histoire comme ces deux séquences où l’on voit le musicien dont on entend la musique ainsi que le réalisateur/acteur regarder au loin (52’24 et. Ces pauses dans le récit ouvrent des instants de réflexion pour le spectateur. Les réverbérations étirées de la musique et l’attitude de Rabah / Kamel donne au film cette teinte mélancolique, vague à l’âme ou mal du pays…

Cécile Paturel, le 26 août 2008